Encadrement des loyers : « Ce mécanisme expérimental n’a rien solutionné dans le logement »
L’encadrement des loyers tel qu’il existe aujourd’hui rate sa cible, affaiblit le parc locatif privé et freine les dynamiques vertueuses. Telle est la conclusion du rapport sur l’encadrement des loyers présenté par l’UNPI, l’Unis et le SNPI, le 1er juillet 2025 à Paris, au lendemain de la remise du rapport parlementaire sur le statut du bailleur privé à Valérie Létard, ministre du Logement.

Les trois organisations pointent les « effets pervers » du dispositif créé par la loi Alur de 2014, modifié par la loi Elan de 2018 et prolongé par la loi 3DS de 2022 à titre expérimental jusqu’en novembre 2026.
« Ce mécanisme, toujours expérimental en 2025, n’a rien solutionné dans le logement. Son usage est idéologique, comme à Lyon. Il faut modifier la loi Alur », affirme Sylvain Grataloup, président de l’Unpi, alors qu’une proposition de loi vise à pérenniser le dispositif déposée par Danielle Simonnet, députée Écologiste et sociale.
Trois incohérences sont mises en avant
• Le dispositif s’appuie sur des « données non vérifiables, partielles et incohérentes laissant toute la place à des interprétations floues », selon les trois organisations. « Alors que les loyers de référence sont exprimés en €/m2, les grilles transmises aux préfets ne précisent pas les surfaces moyennes associées aux différentes typologies de logements ».
De plus, le dispositif par le biais de l’art. 140 (loi Elan) « parle des loyers privés. Or il ne devrait considérer que les loyers libres et rien d’autre. La base de calcul du loyer médian est donc faussée », dit Frédéric Pélissolo (UNPI).
• Il ne repose pas sur une définition précise d’un loyer abusif ou excessif, aux « sources des difficultés », selon Albane Corbel, juriste du SNPI.
• Il permet des compléments de loyer qui sont appliqués sur des critères jugés flous et subjectifs (notion de caractéristiques « déterminantes ») donnant lieu à interprétation lors des commissions de conciliation.
« Nous avons participé à l’expérimentation, nous avons agi en justice à plusieurs reprises. Le bilan est plutôt négatif. C’est un constat d’échec sur le terrain. L’encadrement des loyers aggrave la pénurie de logements », selon Danielle Dubrac, présidente de l’Unis.
Les trois organisations proposent une réforme en profondeur du dispositif (avec cinq pistes de travail) et considèrent qu’il sera en débat dans plusieurs grandes villes lors des élections municipales en 2026.
Les 5 propositions de solutions « plus équilibrées »
Remettre le bon sens au cœur du dispositif
- Reconnaître que tous les marchés locaux ne se valent pas
- Tenir compte de la qualité réelle des logements
- Encourager les propriétaires qui investissent, entretiennent, rénovent
- Laisser une marge d’appréciation (plutôt qu’une grille rigide et uniforme)
Rendre possible une modulation intelligente des loyers
- Intégrer un bonus de loyer encadré en cas de rénovation énergétique significative
- Reconnaître explicitement des compléments de loyer standardisés, pour certaines caractéristiques clairement définies (terrasse, vue, double exposition, standing…)
- Simplifier les procédures de justification, pour éviter le contentieux systématique
Mettre fin à l’insécurité juridique
-
Clarifier les règles, en publiant un guide opposable aux parties et aux juges
-
Garantir la stabilité des règles pendant toute la durée du bail (éviter les effets rétroactifs)
-
Instaurer un droit au complément de loyer justifié, contrôlé en amont et non révisable a posteriori (sauf fraude manifeste)
Encourager la rénovation plutôt que la pénaliser
- Articuler les objectifs de transition énergétique avec ceux de la politique du logement
- Autoriser un ajustement du loyer plafonné en fonction de l’investissement réalisé (avec justificatifs à l’appui)
- Renforcer les dispositifs incitatifs et surtout, en permettre l’amortissement locatif
Renforcer la transparence plutôt que la contrainte
- Développer des observatoires locaux ouverts et régulièrement mis à jour
- Inciter les professionnels à publier des fourchettes de loyers par quartier en lien avec les DPE, la qualité de l’immeuble…
- Valoriser les bailleurs exemplaires, plutôt que de les mettre tous dans le même panier