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Bailleur privé : remise du rapport parlementaire à Valérie Létard « autour de cinq mesures chocs »

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Le rapport parlementaire sur le statut du bailleur privé, réalisé par Mickaël Cosson, député (Modem) des Côtes d’Armor et Marc-Philippe Daubresse, sénateur (LR) du Nord a été remis le 30 juin 2025 à Valérie Létard, ministre chargée du Logement. Il préconise « cinq mesures chocs pour relancer l’investissement locatif » autour d’un système d’amortissement et doit servir de base pour une intégration du dispositif dans le projet de loi de finances 2026.

Réunion de remise du rapport sur le statut du bailleur privé, le 30 juin 2025. - © A.T.
Réunion de remise du rapport sur le statut du bailleur privé, le 30 juin 2025. - © A.T.

Le rapport propose les mesures suivantes pour les mutations à compter du 1er décembre 2025 :

• 5 % d’amortissement pour le neuf ;

• 4 % d’amortissement dans l’ancien, sous condition de 15 % de travaux ;

• 50 % d’abattement pour la location nue de longue durée ;

• bonus d’amortissement de 0,5 à 1,5 % pour les loyers abordables ;

• exclusion des biens mis en location de longue durée de l’assiette de l’impôt sur la fortune immobilière.

Selon les estimations du rapport, la mise en place des mesures proposées permettrait une augmentation de l’offre de logements offerts à la location de l’ordre de 90 000 logements par an d’ici 2030 (40 000 investissements locatifs dans le neuf, 30 000 dans l’ancien et 20 000 logements neufs débloqués par l’investissement locatif dans le neuf en accession).

Ces mesures permettraient de générer + 0,5 Md€ dès 2026, + 1,1 Md€ en 2027 et + 1,9 Md€ par an en moyenne sur la période 2026-2036.

« Ce statut permettra de relancer un secteur de la construction qui connaît l’une de ses pires crises depuis 30 ans, avec des impacts désastreux sur l’emploi (50 000 emplois menacés en 2025), en recréant près de 100 000 emplois à échéance 2030. L’effet global de cette réforme est donc positif pour les finances publiques, sans comptabiliser les retombées économiques pour la filière  », selon le rapport.

« Ce rapport propose un cadre fiscal clair, incitatif et stable pour une réforme équilibrée des finances publiques. Ces propositions dessinent les contours de ce statut du bailleur privé que les professionnels de l’immobilier et du bâtiment, les investisseurs, promoteurs, financeurs et opérateurs attendent depuis de nombreuses années. Loin de l’image du multipropriétaire rentier, nous devons reconnaître l’engagement des propriétaires particuliers, leur utilité économique et sociale, et encourager l’investissement locatif privé », déclare Valérie Létard.

Proposition 1 : ouverture de l’amortissement des biens à la mise en location sur longue durée et rehaussement à 50 % de l’abattement pour le régime micro-foncier

Le rapport préconise une mesure d’amortissement de 5 % pour le neuf sur 20 ans, et de 4 % pour l’ancien avec une condition de travaux à hauteur de 15 % de la valeur du bien pour tous les biens en mutation à compter du 1er décembre 2025.

Pour le micro-foncier, dont l’abattement est aujourd’hui fixé à 30 % pour le nu et 50 % pour le meublé, la mission propose un alignement à 50 %, avec un plafond de revenus de 30 000 €.

« Dans un souci de simplicité, la mission souhaite que l’amortissement soit un amortissement fiscal, donc forfaitaire, sur la base de la valeur du bien hors foncier, augmentée des éventuels travaux. »

Proposition 2 : bonus de rentabilité pour les logements proposés à un loyer abordable

La mission propose de récompenser les bailleurs proposant un loyer abordable dans les conditions suivantes :

  • Pour le régime des revenus fonciers au « réel », un bonus d’amortissement de 0,5 %, 1,0 % et 1,5 % suivant que le loyer corresponde aux loyers intermédiaires, sociaux ou très sociaux appliqués au titre du dispositif Loc’Avantages ;

  • Pour le régime micro-foncier, un bonus d’abattement forfaitaire de 5 %, 10 % et 15 % suivant que le loyer corresponde aux loyers intermédiaires, sociaux ou très sociaux ;

  • Suppression de l’obligation de conventionnement avec l’agence nationale de l’habitat (Anah) dans le cas d’un investissement avec travaux.

Proposition 3 : augmentation à 40 000 € du plafond d’imputation du déficit foncier

« Le plafond du déficit foncier reportable sur le revenu global est aujourd’hui de 10 700 €, non revalorisé depuis 25 ans, malgré la hausse continue des loyers et charges, mais aussi la hausse des prix de l’immobilier, en particulier dans le neuf. Ce plafond n’est aujourd’hui majoré à titre provisoire qu’en cas de travaux de rénovation énergétique (21 400 €). Ces niveaux sont insuffisants au regard des investissements consentis. La mission préconise de rehausser le plafond d’imputation du déficit foncier à 40 000 €.  »

Proposition 4 : exclure les biens mis en location de longue durée de l’assiette de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI)

La mission propose d’exclure les biens mis en location de longue durée de l’assiette de l’impôt sur la fortune immobilière (IFI).

« Si la mise en place de l’impôt sur la fortune immobilière visait à taxer les situations de rente, elle n’aurait pas dû s’appliquer aux biens mis en location de longue durée, nue ou meublée, car ils contribuent à la richesse nationale et au dynamisme de notre économie. Les propriétaires-bailleurs, qui sont des entrepreneurs, prestataires de services de logement, se trouvent ainsi pénalisés par cette imposition indue de leur patrimoine. »

Proposition 5 : alignement de la durée de détention avant exonération de la plus-value avec la durée d’amortissement à 20 ans

En cohérence avec la durée d’amortissement proposée à 20 ans, la mission propose de ramener à 20 ans la durée de détention avant exonération de la plus-value, qu’il s’agisse de l’impôt sur le revenu (durée de 22 ans aujourd’hui) ou des prélèvements sociaux (durée de 30 ans aujourd’hui).

« Cette durée est plus cohérente avec le projet d’un investissement immobilier en vue de préparer sa retraite et aurait pour avantage de limiter la rétention foncière, sans pour autant inciter à une quelconque spéculation. »

Mesures complémentaires

Compte tenu du délai imparti à ses travaux, la mission a pris le parti de citer les principaux chantiers de travail à conduire en complément de la réforme de la fiscalité. En outre, des mesures complémentaires seront sujettes à des arbitrages.

« Nous n’avons pas développé d’autres mesures secondaires (décret charges, garantie loyers impayés), mais elles sont mentionnées et nous soutenons la garantie Visale par Action Logement et les recommandations du rapport Nogal qui formulait des préconisations pour sécuriser la location d’un bien, au bénéfice du propriétaire comme du locataire. En ce qui concerne l’encadrement des loyers, nous attendons les résultats de la mission d’évaluation lancée par le Gouvernement  », indique Marc-Philippe Daubresse.

« Jusqu’ici, il y avait autant de définitions que d’acteurs  » (Valérie Létard)

« Des arbitrages auront lieu. Puis viendra le débat parlementaire. Mais il fallait d’abord une base. Il fallait définir ce que l’on entend par “statut de l’investisseur locatif privé”, car jusqu’ici, il y avait autant de définitions que d’acteurs. Le travail mené a permis de dégager un socle commun.

Valérie Létard, ministre chargée du Logement. - © D.R.
Valérie Létard, ministre chargée du Logement. - © D.R.

Une fois le projet de loi de finances déposé par le gouvernement, s’ouvre un second temps : celui des amendements, des équilibres à trouver à l’Assemblée, puis des arbitrages au Sénat. Le dépôt du PLF ne constitue que le point de départ. Il y aura deux séquences : ce que nous intégrons dans le texte initial, et ce que le débat parlementaire pourra compléter ou ajuster.

Nous allons désormais suivre cette méthode pour répondre aux besoins de nos concitoyens. L’investissement locatif privé est en chute libre. On aura beau renforcer le logement social, sans relancer le locatif privé, nous n’augmenterons pas l’offre.

Il faut amplifier l’effort : rénover pour répondre à la trajectoire de décarbonation, et produire davantage pour répondre à la demande des millions de personnes qui attendent un logement. »

« L’ancien n’a pas été sacrifié » (Danielle Dubrac, Unis)

« Ce qui nous est proposé est un statut pérenne, qui puisse être ancré dans le marbre. Nous ne voulions pas d’une mesure qui puisse être remise en cause d’une loi de finances à une autre. Il est à saluer que les auteurs de ce rapport considèrent enfin le bailleur comme une entreprise, un investisseur qui, comme toute entreprise, amortit son outil de production.

Danielle Dubrac, présidente de l’Unis - © D.R.
Danielle Dubrac, présidente de l’Unis - © D.R.

Ce cadre donne une reconnaissance claire, un socle juridique pour sécuriser les droits et les devoirs de l’investisseur privé.

Reste à savoir si les projections de recettes convaincront Bercy. Les chiffres qui ont été donnés me semblent sérieux et bien travaillés. Toutefois, chacun connaît la prudence, voire la méfiance de Bercy.

Je suis très satisfaite de constater que l’ancien n’a pas été sacrifié. Nous avions toutes les raisons de craindre qu’il le soit. »

« Ce que vous proposez est simple à comprendre » (Véronique Bédague, Nexity)

« Vous avez mis sur la table et démontrer la réalité de la faiblesse de la rentabilité de l’investissement locatif. Dans ce rapport, on voit bien le lien avec les ressources de l’État : quand il n’y a pas d’investissement locatif, il y a une faiblesse des recettes de l’État. Les Français ont besoin d’entendre que l’État soutient et qu’il y a une mesure choc.

Véronique Bédague, PDG de Nexity - © D.R
Véronique Bédague, PDG de Nexity - © D.R

Ce que vous proposez est simple à comprendre et cela peut vraiment nous aider à reprendre les réservations. Ce n’est pas uniquement l’investissement locatif qui va en bénéficier, mais aussi l’accession à la propriété et le logement social, car dans nos métiers tout est lié.

C’est un grand progrès et nous serons autour de vous autant que nécessaire pour soutenir cette mesure qui n’est pas uniquement une mesure pour la profession, mais pour tous les Français qui ont besoin de se loger. »

« Il y aura un travail de conviction à mener  » (Loïc Cantin, Fnaim)

« On ne peut qu’être satisfait de ce rapport. On découvre une véritable bombe fiscale avec vos propositions à la fois sur le marché du neuf et de l’existant. Elles assurent un traitement équitable pour l’existant, qui est confronté à des difficultés : rénovation, stabilisation du marché, besoin de restaurer la confiance de l’investisseur, dont la Fnaim se satisfait.

Loïc Cantin, président de la Fnaim - © Fnaim
Loïc Cantin, président de la Fnaim - © Fnaim

L’imputation de 40 000 € sur les déficits fonciers est de nature à provoquer des envies d’investir qui dépassent toute espérance. Tous ceux qui pratiquent ce métier depuis longtemps savent que ce dispositif est extrêmement incitatif. Selon nous, les objectifs de logements remis sur le parc locatif seront même supérieurs à ceux annoncés par Marc-Philippe Daubresse.

Je reste néanmoins réservé, il va y avoir un travail de conviction à mener auprès des parlementaires et du chef de l’État. Soyez certains que vous pourrez compter sur toutes les organisations professionnelles, dont la Fnaim, pour porter ce rapport, parce que c’est important et il y a urgence. Nous sommes face à la plus grande crise immobilière depuis très longtemps. »