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« La réforme des syndics et copropriétaires était prioritaire » (Danielle Dubrac, présidente UNIS)

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Dans quelles conditions les syndics de copropriétés ont traversé la période de confinement et quel regard porte-t-elle sur la réforme qui touche l’ensemble de ces professionnels ? Danielle Dubrac, nouvelle présidente du syndicat Unis, a répondu à ces deux questions en exclusivité à News Tank.

Danielle Dubrac, présidente de l’Unis - © D.R.
Danielle Dubrac, présidente de l’Unis - © D.R.

Comment les syndics de copropriétés ont vécu la période de confinement de mars à mai 2020 ?

Au cours de la crise du Covid-19, de nombreuses difficultés sont apparues en période de confinement car le logement était aussi devenu un lieu de travail, d’école et de loisir. C’est pourquoi nous avons alerté contre les violences conjugales ou la maltraitance des enfants à l’intérieur des copropriétés. L’Unis a élaboré un guide sanitaire pour la continuation de l’activité des professionnels de l’immobilier pour la période post-Covid-19 qui a donné lieu à la reprise des activités dans le respect des impératifs sanitaires. Nous avons, par exemple, aidé les gardiens d’immeubles qui ont réalisé un travail remarquable et nous les avons aidés sur l’achat des masques et des gels hydro-alcooliques. 

Quant à l’activité de syndic, on est un peu sous l’eau durant l'été car il y a beaucoup de rattrapage en termes de convocations, de contrôles de comptes, d’assemblées générales, de conseils syndicaux. On attendait avec impatience un certain nombre de documents mais le déploiement numérique a été utile. Si l’on pouvait améliorer la présence des copropriétaires à distance pour prendre les bonnes décisions au bon moment, ça serait plus efficace.

Quant au formulaire par correspondance, c’est une bonne avancée quand les personnes ne peuvent pas physiquement venir. Les personnes sont attentives à ce qui pourrait se passer dès l’automne 2020 et prennent des précautions en vue d’une éventuelle 2e vague épidémique.

Quel regard portez-vous sur le sujet des CEE (certificats d’économie d’énergie) en matière de rénovation énergétique des logements ?

Lorsqu’il y a une rénovation énergétique d’un bâtiment avec isolation, les professionnels de l’immobilier sont les premiers à être conseillé car en termes d'économies d'énergies, nous sommes très conscients de préserver la Planète. La conscience écologique est devenue en second plan de la conscience économique. Il y a quand même un basculement dans l’attitude des gens sur la préservation de la planète et des ressources naturelles. C’est le montage des dossiers des CEE qui pose problème. Il faudrait un guichet unique pour toutes les aides. C’est le cas, par exemple, quand on passe avec un ingénieur financier.

Il y a aussi une lenteur administrative qui n’est pas du tout liée à la qualité des intervenants mais au mécanisme, l’agrément, le transfert, la vérification et l’acceptation des dossiers. Nous avons beaucoup de choses à améliorer dans la chaîne pour enfin donner de l’aide. Le temps de maturation et de décision positive de tels ou tels travaux est un temps long. Les gens ont besoin de comprendre l’utilité du chantier, le rôle du conseil syndical, le message en assemblée générale, le financement. Le copropriétaire ne choisit pas son code de copropriété, il le subit.

Les syndics et les copropriétaires doivent s’adapter en « urgence » à une réforme entrant en vigueur au travers de la publication de deux décrets et arrêtés à destination des copropriétaires, syndics de copropriété professionnels et bénévoles, présidents de conseils syndicaux et assureurs. Quelle est votre ambition sur le sujet ambitieux des copropriétés ?

Les syndics et les copropriétaires doivent effectivement s’adapter en urgence à une réforme entrant en vigueur très tardivement dans des circonstances exceptionnelles, en pleine épidémie du Covid-19. Le retard de publication du décret du 3 juillet 2020 complique la lisibilité d’un édifice juridique déjà constitué de règles pérennes (ordonnance de 2019) et de dispositions temporaires (ordonnance du 20 mai 2020). Ce retard affecte la vie quotidienne des 25 millions de personnes résidant dans une copropriété dont 8 millions sont copropriétaires.

La réforme était donc prioritaire. Le droit de la copropriété est très formaliste. Mais il s’était progressivement éloigné des réalités et des attentes. Nous reconnaissons que dorénavant, le binôme syndic et conseil syndical est renforcé, et les assemblées générales gagneront en efficacité. Mais le semestre qui s’ouvre va être très compliqué à gérer. Nous en sommes convaincus.

Le vote par correspondance est publié, depuis le 3 juillet 2020, c’est donc une bonne nouvelle. Le contrat de syndic aussi, mais son entrée en vigueur est progressive. Pour le reste, utile aussi, il s’agira de former en accéléré les gestionnaires et d’informer les copropriétaires et d’adapter les trames et les logiciels. Ce n’est pas évident en cette période estivale. L’entrée en vigueur au 1er juin 2020 de l’ordonnance et de son décret d’application était prévue par la loi ELAN.

Le confinement a effectivement montré qu’en très peu de temps des solutions pragmatiques ont pu être mises en place avec succès. Il faudra conserver ce qui a fonctionné. La réforme a pour objectif de faciliter la compréhension d’un ensemble de textes devenus complexes et de favoriser la prise de décision en assemblée générale, notamment sur la rénovation et l’amélioration énergétique des immeubles. Les deux mesures phares du décret concernent le contrat de syndic et le vote par correspondance.

Quelles sont les nouveautés des dispositions en faveur des syndics de copropriété ? 

Les dispositions transitoires concernent les mandats expirants entre le 12 mars et le 23 juillet : ces mandats sont renouvelés jusqu’à la tenue d’une AG devant se tenir avant le 31 janvier 2021. Pour les mandats dont le terme est postérieur au 23 juillet, le renouvellement ne s’applique pas et une AG doit être convoquée avant la fin du mandat. Dans tous les cas, les règles de l’ordonnance de 2019 et du décret de juin 2020 s’appliquent.

  • Le contrat-type est modifié : des services supplémentaires peuvent être proposés, dans le contrat, entre le syndic et un copropriétaire. Le contrat-type rétablit un juste équilibre entre l’encadrement réglementaire et la liberté contractuelle. L’entrée en vigueur des dispositions est étalée dans le temps.
  • La mise en concurrence des syndics relève de l’initiative du conseil syndical et des copropriétaires.
  • Les règles de résiliation du contrat de syndic, prévues par l’ordonnance, ont pour objectif d’encadrer les pratiques et d’assurer la désignation d’un successeur et la bonne transmission des archives.
  • Le plafond de l’état daté, en cas de vente d’un lot, est entré en vigueur le 1er juin.

Et du conseil syndical ? 

Les mandats des conseillers syndicaux suivent un régime identique à celui des syndics (période du 12/03 au 23/07). Notons que l’assemblée générale peut déléguer au conseil syndical certaines décisions, dans la limite d’un budget voté. Concernant, l’assemblée générale, sont déjà en vigueurs, le recours à la visioconférence et la hausse du nombre de voix (de 10 à 15 %) qu’un copropriétaire peut détenir par procuration (pouvoirs), pendant la période transitoire (jusqu’au 31/01/2021). L’ordonnance de 2019 a modifié et simplifié les règles de majorité pour faciliter la prise de décisions et notamment :

  • Article 24 : les travaux d’accessibilité, l’installation de bornes de recharges de véhicules électriques, l’installation de dispositif pour le stationnement des vélos, en liaison avec la loi LOM et loi ELAN.
  • Article 25 : la passerelle de l’article 25-1 ouvrant droit à un second vote est généralisée. Mais attention, lorsqu’on n’a pas obtenu la désignation du syndic, le 25-1 s’applique mais en l’absence de désignation lors d’un 2e vote, il n’y a plus la possibilité de reconvoquer une nouvelle AG, contre l’avis de l’UNIS. Les travaux d’amélioration énergétique, jadis relevant de l’article 24, sont dorénavant soumis à l’article 25.
  • Article 26 : une passerelle permettant un 2e vote a été créé : si la majorité des membres représentant les 2/3 de voix n’est pas atteinte, mais qu’un tiers des membres a voté favorablement, la décision en second vote est prise à la majorité des voix de tous les copropriétaires.
  • Les emprunts collectifs sont votés avec les travaux concernés.