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« Cette crise du logement est brutale, exceptionnelle » (François Teste du Bailler, GCC Immobilier)

Par Christian Capitaine | Le | Agence immobilière indépendante

Après avoir rejoint le Groupe GCC Immobilier en 2018 pour prendre la direction de son pôle construction, François Teste du Bailler a été nommé, le 29 mars 2023, président du directoire du groupe. Dans un entretien à Immomatin, il fait toute la lumière sur l’activité promotion immobilière de cette ETI qui a pesé, en 2022, un chiffre d’affaires de 1,2 milliard d’euros.

François Teste du Bailler, président du directoire de GCC Immobilier - © D.R.
François Teste du Bailler, président du directoire de GCC Immobilier - © D.R.

Que pèse l’activité promotion immobilière dans le CA du Groupe GCC Immobilier ?

Cette activité promotion immobilière est portée, au sein du Groupe, par la société Edelis, que nous avons rachetée en 2017 et qui est dirigée par Christian Brézet. En 2022, elle a réalisé un chiffre d’affaires de 200 millions d’euros. Nos deux autres pôles, la construction et l'énergie, ont, pour leur part, réalisé respectivement 800 millions et 200 millions d’euros de chiffre d’affaires.

Edelis, qui a plus de trente années d’existence, a bâti son histoire sur la défiscalisation. Cette activité est moins développée car le marché s’est ouvert. Aujourd’hui, Edelis c’est un tiers de ventes en blocs aux bailleurs sociaux, un tiers d’accession libre et un tiers de ventes en réseaux (via les conseillers en gestion de patrimoine), soit un dernier canal de vente qui, chez Edelis, se porte très bien.

Dans quelles régions la société déploie-t-elle ses activités ?

Edelis est implantée dans quatre régions avec, pour chacune, une équipe de direction dédiée : l’Ile-de-France, où elle réalise 50 % de son activité ; le sud-ouest, soit 20 % de son business, avec une forte présence, ces temps-ci, dans l’agglomération de Bordeaux ; puis la région Rhône-Alpes et le sud-est.

Pour compléter la panoplie de ces quatre secteurs géographiques, nous avons mis en place, à l’échelle nationale, une direction des consultations pour venir adresser des concours sur des programmes lancés par des établissements publics d’aménagements, dont un grand nombre sont des programmes écoresponsables. Sur ce terrain, nous avons enregistré, ces derniers temps, de beaux succès.

Quel bilan dressez-vous pour l’activité commerciale d’Edelis au cours des derniers mois ?

Si l’on se projette plus en arrière, la société a signé, au cours des années 2019, 2020, 2021 et 2022, respectivement 1 400, 758, 1 037 et 729 actes. Plus près de nous, nous avons vu globalement nos réservations chuter de 40 % en novembre et décembre derniers.

En revanche, depuis janvier 2023, nous nous en sortons plutôt bien, avec par exemple 65 réservations en mars, ce qui se révèle conforme au rythme que nous avions l’habitude de suivre lors des bonnes années.

Ces prochains mois seront consacrés au renforcement de notre carnet de commandes afin de préparer les années futures.

En 2023, nous ferons une pause : après 200 millions d’euros l’an passé, nous devrions réaliser, en 2023 sur cette partie promotion, un chiffre d’affaires de 150 millions d’euros. Ces prochains mois seront consacrés au renforcement de notre carnet de commandes afin de préparer les années futures.

Quelles sont vos perspectives sur le plan des affaires ?

Le marché de la promotion immobilière repartira. Nous n’en n’avons aucun doute. Les besoins en logement, en France, sont énormes. D’ailleurs, on ne cesse de s’interroger, chaque année : où sont les 400 000 à 500 000 logements supplémentaires, au minimum, requis pour loger l’ensemble de nos compatriotes ?

Rappelons deux chiffres : la France compte entre 3 et 4 millions de personnes mal logées, avec notamment des besoins considérables dans le social. La demande en logement est bien présente. Et c’est une bonne nouvelle pour les professionnels de notre secteur. Mais il reste à la satisfaire, à lever les freins.

Quels freins faut-il lever ?

Nous connaissons bien les raisons de ce blocage, les raisons pour lesquelles la production a faibli. Elles concernent tout d’abord les tensions sur le foncier. Certes nous sommes engagés sur des concours initiés par des établissements publics d’aménagements dont je faisais écho auparavant et pour lesquels les prix sont parfois maîtrisés. Mais il n’empêche : une pause sur la hausse des prix du foncier se révèle indispensable pour que l’activité reparte.

A cela s’ajoute les coûts de construction qui se sont envolées dans le sillage de la flambée des prix des matières premières. Enfin, n’oublions pas la question de l’écoconception, qui s’enracine et qui nous engage à construire à des niveaux de coûts plus élevés que par la passé, soit des hausses qui ont été comprises, ces deux dernières années, entre 20 et 30 %.

Cette crise, je la vois comme une opportunité de nous repositionner sur nos métiers, sur notre façon de construire.

Le secteur du logement est en crise. Cette crise est brutale, exceptionnelle, avec des acquéreurs qui voient leur capacité d’épargne se contracter. Mais comme souvent, les crises nous apprennent, en tant qu’acteur de la construction et de la promotion, à nous organiser différemment.

Cette crise, je la vois comme une opportunité de nous repositionner sur nos métiers, sur notre façon de construire. Chez Edelis, nous avons la chance de pouvoir nous appuyer sur un pôle construction solide et performant, notamment pour tout ce qui concerne les domaines de l’ingénierie. Chez Edelis, nous avons cette capacité en interne à bien préparer les conditions de la reprise.

J’ajoute qu’au niveau du groupe, nous nous appuyons sur une cinquantaine d’entités spécialisées et autonomes, qui jouissent d’une forte liberté d’entreprendre. Ce modèle d’organisation décentralisée nous offre une grande agilité d’action et mécaniquement une plus grande aisance pour rebondir.

Comment se porte votre activité construction ?

Elle se porte très bien. Nous avons un carnet de commandes exceptionnel. Nous sommes pour cette partie construction chez GCC Immobilier défragilisés du marché du logement neuf. Et pour cause : nous construisons des hôpitaux, des établissements d’enseignement, des usines et peu de logements neufs.

J’ajoute qu’au cours des dix dernières années, nous avons réalisé 25 % de notre activité en rénovation et réhabilitation. L’objectif pour 2030 est de franchir le seuil des 50 %.

Un point sur vos relations avec les élus. Comment mieux travailler avec eux pour relancer les programmes ?

Les maires non-bâtisseurs n’ont pas de couleurs politiques. Et nous sommes naturellement tenus de nous plier à leurs décisions de ne pas construire. Mais pour autant, on observe qu’avec le temps, et eu égard aux besoins en logements dont fait face le pays, ils font preuve de pragmatisme. Nous nous adaptons, mais nos relations avec les élus vont dans le bons sens.

A titre d’exemple, nous construirons prochainement, dans la ZAC des Girondins, dans le 7e arrondissement à Lyon, un programme de promotion immobilière innovant bien en phase avec notre stratégie en matière de développement durable. Il s’agira d’une construction en pierre massive, avec un approvisionnement en circuit court, comme on en faisait au XIXe siècle. Le permis de construire devrait nous être prochainement délivré. Nous avons hâte de démarrer cette opération.