Évaluation

PTZ : « Le conserver et le doper partout, à 40 % dans le neuf et l’ancien » (P. Taboret, Cafpi)

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Niveau des taux d’emprunts et d’usure, état du marché de la transaction dans l’ancien, impact du plan de relance du Gouvernement pour l’immobilier neuf, avenir du PTZ : Philippe Taboret, directeur général adjoint du courtier en prêt immobilier Cafpi, a livré, à notre partenaire New Tank Cities, son analyse de l'évolution du marché de l’immobilier à l’aube du dernier du trimestre 2020.

Philippe Taboret, directeur général adjoint de Cafpi - © WWW.MEMEPASMALPROD.COM
Philippe Taboret, directeur général adjoint de Cafpi - © WWW.MEMEPASMALPROD.COM

Quelle est la situation des taux d’emprunt en octobre 2020 sur 10 ans et plus ? 

Il n’y a pas eu de mouvements au niveau des taux d’emprunt en octobre 2020. Ils restent très attrayants pour les emprunteurs. En septembre 2020, nous avons négocié, pour nos clients, des taux semblables à ceux d’août 2020, de 0,67 % sur 10 ans, 0,88 % sur 15 ans, 1,01 % sur 20 ans et 1,23 % sur 25 ans. En octobre 2020, les taux moyens proposés par les banques sont à 1,2 % sur 20 ans et Cafpi a négocié des taux pouvant atteindre 0,81 % sur 20 ans pour les meilleurs profils.

Les taux pratiqués sont très inférieurs aux taux proposés par les banques, ce qui démontre que les bons profils bénéficient de bonnes décotes par rapport aux taux affichés. Les moins bons profils continuent, en revanche, d’être limités dans leurs projets d’accès à la propriété, avec pour cause principale une exclusion à l’accès au crédit par les critères du HCSF. 

Une baisse de production des projets immobiliers des ménages français est-elle à craindre à la fin d’année 2020 ? 

La crise sanitaire liée à la Covid-19 a brisé, ou au mieux retardé, les projets immobiliers de nombreux ménages et a pour conséquence directe une baisse de la production de crédit et du nombre de ventes. Ces résultats seront constatés lors de la sortie des chiffres du 3e trimestre 2020 de la Banque de France.

Le seul point positif en octobre 2020 de cette crise sanitaire est la hausse de 11 points de base du taux d’usure pour les prêts immobiliers sur 20 ans et plus. Elle permettra à de nombreux emprunteurs solvables d’être de nouveau éligibles au crédit immobilier. La hausse du taux d’usure est la conséquence des crédits débloqués le dernier trimestre 2020 sur des dossiers d’avant confinement et mis en pause. Période à laquelle les taux étaient plus élevés qu’aujourd’hui de 0,15 % en moyenne. La baisse de la demande causée par la crise sanitaire, en plus des critères restrictifs du HCSF, va inexorablement se poursuivre au dernier trimestre 2020. 

Il est très urgent de redonner le droit d’emprunter pour se loger aux nombreux ménages rejetés et pourtant solvables. Le taux d’usure exclut les profils particuliers alors que les recommandations du HCSF empêchent trop de primo-accédants, faute d’apports nécessaires, et d’investisseurs bloqués par la limite des 33 % d’endettement de réaliser leurs projets immobiliers. Gouvernement devrait à mon avis doit contraire pousser à l’action et faire en sorte que le 2e semestre 2020 amortisse la perte d’activité du début 2020. Il serait bien inspiré d’écouter la Commission européenne. Pour être cohérent avec elle, le Gouvernement devrait se sentir obligé de passer outre les recommandations du HCSF.

Est-ce que vous voyez une « éclaircie » du marché du logement neuf pour l’année 2021, avec les promesses d’action du Gouvernement annoncées en septembre 2020 dans le cadre du plan de relance ? 

D’une part, les autorités gouvernementales, conscientes de la situation ont commencé à réfléchir sur un relâchement des conditions d’emprunt du HCSF et d’autre part, amorcé un changement de cap sur les aides à l’accession à la propriété. Par exemple, le PTZ, qui devait initialement s’arrêter fin 2021, a été prolongé au moins jusqu’à 2022 et devrait être amélioré dans sa forme. Même si nous sommes rassurés par ces annonces, nous estimons qu’il ne faut pas perdre de temps dès 2021, au moins une partie des améliorations de ces aides. Un plan de relance de l’immobilier s’impose.

Pour l’orchestrer, le Gouvernement doit donc se saisir de tous les outils à sa disposition : élargissement du PTZ dans le neuf et l’ancien, retour de l’APL Accession, pérennisation du dispositif Pinel et, pourquoi pas, accentuation immédiate de la baisse des droits de mutation, au lieu de la reporter à janvier 2021. Cette fin d’année 2020 risque d’être compliquée pour l’ensemble du marché, mais je reste convaincu qu’une éclaircie existe pour 2021, avec les promesses d’action du Gouvernement, qui permettront à chaque branche du secteur du logement de relancer leur activité et aux Français de repenser leurs projets d’accession à la propriété. 

Dans quel état d’esprit avez-vous abordé la 1e réunion de concertation du secteur de la construction et de l’immobilier sur les évolutions du PTZ le 28 septembre 2020 au ministère de la Transition écologique ? 

Nous courtiers, banquiers et professionnels de l’immobilier, sommes satisfaits que le Gouvernement s’intéresse au soutien à la construction et au financement des acquéreurs et organise une première réunion de concertation sur les évolutions du PTZ en présence des fédérations, organisations professionnelle et association.

Dans un très bon état d’esprit, j’ai pu expliquer en tant que dirigeant de Cafpi et président de l’APIC que l’on alerte depuis 6 mois sur l’effondrement du marché du logement neuf. Les affaires diminuent. Il y a une forte baisse de la demande. Les chiffres du logement neuf issus du SDES en septembre 2020 sont très mauvais. Il ne faut pas se faire d’illusion, on va sortir moins de 400 000 logements à la fin 2020. Les prix du neuf augmentent. Les promoteurs disposent de moins de biens en cette rentrée 2020. Sans compter que les crédits bancaires ne changent pas.

Quels sont les scénarios proposés par le Gouvernement dans le cadre de cette concertation ? Quel est son calendrier ?

Le Gouvernement propose donc la prolongation d’un dispositif qui a fait ses preuves sans amélioration du produit et à enveloppe budgétaire constante. Il est défini comme un outil du plan de relance. La proposition vise à poursuivre ce qui fonctionne sans augmenter le budget, ce que nous pouvons comprendre dans une période de disette budgétaire. Mais les ménages ont besoin de financements. 

Sur les propositions de financement et de budget du dispositif PTZ évoquées à la réunion de concertation, on nous propose, par exemple, un PTZ à taux négatif consistant à rembourser moins ce qu’on emprunte. Cette réflexion n’est pas idiote. Nous courtiers, banquiers et professionnels de l’immobilier ont bien compris qu’au lieu de payer des taux d’intérêts normaux, on remboursera 1 % de la dette. On a soulevé ainsi aux représentants de Bercy présents à la réunion le risque d’incompréhension des emprunteurs. 

Nous rejoignons les professionnels de la construction pour que le PTZ dans le neuf et dans l’ancien avec travaux passe à 40 % dans toutes les zones, y compris en zone B2 et C et y compris dans l’ancien en zone A et B1 jusque fin 2024. Nous avons insisté auprès du Gouvernement pour affirmer que le dispositif a fait ses preuves depuis son existence depuis comme outil de relance de la construction et de l’accession.

À chaque fois, le PTZ a boosté le secteur. Il faut le conserver et le doper partout, à 40 %  sur le marché du logement neuf et de l’ancien. L’importance est bien de relancer l'écosystème de l’immobilier. Des emplois sont aussi en jeu. À l’issue de la concertation, le Gouvernement proposera son arbitrage par voie d’amendement au PLF 2021.

Nous avons demandé au Gouvernement de définir rapidement la nouvelle réglementation, au plus tard dès 2021 pour avoir une visibilité du PTZ au 1er janvier 2022. C’est facilement amendable ce mois-ci, en octobre 2020, à l’Assemblée nationale. Nous avons saisi un lobbying politique. Nous sommes confiants.