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Le modèle des portails d’annonces a-t-il encore de l’avenir ?

Le | Portails de petites annonces

Les portails d’annonces ont beau être incontournables, ils sont régulièrement critiqués par les professionnels de l’immobilier. Leur tarification forfaitaire, pas toujours très transparente, fait débat. Pour peu qu’ils plébiscitent un modèle à la performance, les portails de dernière génération semblent avoir une carte à jouer. Mais pour combien de temps ? Ce modèle « au lead » peut-il vraiment s’inscrire dans la durée ? Quatre experts partagent leurs avis

Le modèle des portails d’annonces a-t-il encore de l’avenir ? - © D.R.
Le modèle des portails d’annonces a-t-il encore de l’avenir ? - © D.R.

Depuis l’avènement d’Internet et des portails de petites annonces, plusieurs modèles économiques cohabitent. Ces cinq dernières années, l’un d’entre eux fait toutefois couler beaucoup d’encre : le modèle à la performance. Shelterr, Surface Privée et Superimmo ont notamment opté pour ce système de monétisation dès leur lancement. Sur ces portails, la diffusion des annonces est entièrement gratuite. « Leur modèle économique ne repose pas sur des packs d’annonces mais sur la commercialisation, à l’unité, de chaque contact acquéreur reçu via l’annonce », explique Arnaud Larbodière, PDG de Visiteonline Network, spécialisé dans la qualification de contact ciblé. Sur le papier, les avantages du modèle « au lead » sont nombreux. Primo : « il permet aux professionnels de maîtriser leur budget alloué à la mise en avant de leurs biens sur Internet », amorce Philippe Guéneau, directeur général de Shelterr France. Secundo : il leur évite de payer une première fois « pour voir », les agents immobiliers ne déboursant de l’argent qu’au résultat.

Un modèle adapté aux petites agences ?

Pour toutes ces raisons, un nombre croissant d’agences immobilières se tourne vers cette option. « C’est un modèle pertinent pour celles dont l’activité est soumise à une forte saisonnalité ou celles ayant des portefeuilles limités, diffusant moins de 20 annonces par mois, estime Stéphane Anfosso, directeur général d’A Vendre A Louer. Au delà de ce seuil, le modèle n’est pas forcément avantageux pour les annonceurs. Il est plus rentable d’avoir une approche forfaitaire et ainsi d’acheter du volume. » Selon les portails, le coût moyen d’un lead acquéreur est compris entre 4 et 10 euros. Celui d’un mandat autour de 15 euros. « Si l’on compare ces prix à celui que les agences calculent lorsqu’elles tracent elles-mêmes les contacts que nos annonces génèrent, il y a une différence très importante », assure Stéphane Anfosso, qui avoue qu’A Vendre A Louer pourrait être 3 à 4 fois plus profitable s’il basculait sur ce modèle économique.

Le modèle à la performance : un produit d’appel

Pour Cyril Janin, directeur général de Logic-Immo.com, le modèle à la performance est éphémère. « Il est attrayant pour les nouveaux entrants qui n’ont pas de gros moyens pour entrer sur un marché. Mais, à moins d’être sur un secteur de niche comme l’immobilier neuf, c’est un leurre de croire qu’il est pérenne. Tous les acteurs que je connais qui se sont lancés avec ce modèle ont basculé vers un système au forfait, une fois le buzz retombé », constate-t-il. C’est le cas de Shelterr : il a beau conjuguer les deux modèles, il tire la majeure partie de ses revenus des abonnements qu’il propose. Une approche hybride qui soulève une question : le modèle à la performance n’est-il qu’un produit d’appel ? La réponse penche vers le « oui ». « Nos clients fonctionnent effectivement par palier : ils optent d’abord pour un fonctionnement par lead avant de s’orienter vers nos abonnements mensuels et annuels », souligne Philippe Guéneau, de Shelterr.

Un coût moyen par lead : une hérésie ?

Si le directeur général de Logic-Immo.com émet autant de réserves vis-à-vis du modèle à la performance, c’est qu’il estime qu’il est irréaliste de facturer un prix moyen par lead. « Un lead ne peut pas avoir la même valeur selon qu’il s’agit d’un garage à louer à Charleville Mézières ou d’une bastide à vendre à Fréjus », insiste Cyril Janin. Sans aller jusqu’à pondérer le coût de son lead par type de bien, Shelterr a segmenté son approche commerciale. « Notre lead vendeur coûte 4,90 euros, contre 2,50 euros pour notre lead acheteur et 1 euro pour notre lead location », illustre Philippe Guéneau. Par les questions qu’ils soulèvent, les portails misant sur un modèle à la performance obligent les acteurs traditionnels à se réinventer. Un cercle vertueux qui pourrait servir les intérêts des professionnels, selon Arnaud Larbodière. « Ce modèle fait bouger les lignes : les leaders qui dictent aujourd’hui leurs règles vont demain devoir s’adapter aux nouvelles attentes des agents, qui cherchent à avoir des contacts valides ayant fait l’objet d’une qualification téléphonique », conclut-il.

Aurélie Tachot